A Charleval (Eure), une maison de santé a ouvert ses portes en 2021. Trente-et-un professionnels y travaillent, assurant soins, prévention et information. Comment sont-ils arrivés dans un désert médical où le seul médecin se désespérait ?

PROGRAMME

Démarrage: Décembre 2022

Lieu de réalisation: Charleval (Eure)

ORGANISME(S)

Maison de Santé pluridisciplinaire de Charleval

Charleval - 27380

Rue du Catelier

Site internet

Ou

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COMITÉ DE LECTURE

Date de lecture de la fiche

12/21/2022

Localisation

France Normandie Eure

LOCALISATION
LICENCE

Copyright: Licence Creative Commons Attribution 3.0

Pour citer un texte publié par RESOLIS:

, « Une Maison de Santé pluridisciplinaire à Charleval (Eure) », **Journal RESOLIS**

OBJECTIFS

“Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose… Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer. »”

Un capitaine, sa vigie et son équipage

Cette belle phrase d’Antoine de Saint-Exupéry est la devise de la Maison de Santé pluridisciplinaire de Charleval (Eure) et de son équipe, surnommée « Equipage Santé St Exupéry ». Le capitaine (et président), c’est le docteur Bertrand Fisset. L’histoire a commencé comme un cauchemar. Bertrand Fisset qui, dans sa jeunesse, a été le plus jeune médecin de son territoire l’est resté bien longtemps tandis que ses collègues partaient à la retraite les uns après les autres. Pendant cinq ans, il a lancé des appels à l’aide. En vain. En 2012, il a fait part de ses difficultés à une patiente, Valérie Payen, directrice du Centre social Espace Libre de Charleval. Après avoir réalisé un premier diagnostic qui identifiait les souffrances et les compétences du territoire, elle a proposé une réunion aux professionnels de santé. Onze personnes (plus Valérie) y ont assisté. « Nous ne nous connaissions pas, se souvient le docteur Fisset. Nous prenions nos gardes à tour de rôle, nous étions complètement isolés et très individuels. »

Valérie a été missionnée pour construire, avec tous les acteurs du territoire (devenu en 2014 la communauté de communes), un projet de santé, une maison de santé pluridisciplinaire ainsi qu‘un réseau permettant un maillage entre les différents professionnels.

ACTIONS MISES EN OEUVRE

Il a fallu s’apprivoiser

« J’ai été sidérée de m’apercevoir qu’ils ne se connaissaient pas entre eux et qu’ils connaissaient encore moins le monde médico-social et le monde social. Il a fallu s’apprivoiser ». Les dîners qu’elle a instaurés après chaque réunion y ont beaucoup contribué. Il a fallu aussi faire travailler le public avec le privé et affronter l’opposition virulente de certains professionnels.

Peu à peu le projet a pris corps sans faire appel à des consultants externes, comme aime à le souligner Valérie Payen, devenue la vigie du bateau. « Cela n’a pas de sens de parachuter des consultants. Si l’on veut que les professionnels et les citoyens s’approprient un projet, il doit être élaboré par les gens du cru. » Elle a eu à cœur de rencontrer des structures du même type puis de constituer un équipage et de conforter un leader, le docteur Fisset.

Trente-et-un professionnels sur le pont

Au grand bonheur des habitants, la Maison de santé a ouvert ses portes en 2021. L’équipage santé compte 31 professionnels : médecins, infirmières, kinés, ostéopathe, sage-femme, pédicures-podologues, diététicienne, ergothérapeute, psychologues, psychomotricienne… Des chirurgiens y donnent aussi des consultations. Et parmi les généralistes on trouve de jeunes médecins. Comment a-t-on réussi à les attirer dans une commune de 1734 habitants ? De deux façons. La première : le docteur Fisset est devenu enseignant, ce qui lui a permis de rencontrer de nombreux étudiants et d’accueillir des internes tandis qu’un de ses confrères accueille des externes. Et aussi, et surtout, en tenant compte de leurs aspirations. « Les jeunes nous rient au nez quand nous évoquons les horaires qui étaient les nôtres, ils veulent travailler en équipe. C’est pour cela que j’ai quitté le train de l’ancienne génération qui ne va nulle part. J’ai changé de train », raconte le médecin.

Le bénévolat : un bon remède

La Maison de santé a aussi un rôle d’information et de prévention, proposant par exemple des dépistages du cancer du sein, des réunions pour arrêter de fumer, un café des aidants… Pendant l’épidémie de Covid, le centre social Espace Libre a coordonné le dépistage et la vaccination avec les professionnels de santé du territoire et des bénévoles qui se sont mobilisés pour accompagner les habitants ou aider à remplir les formulaires. Depuis 2013, toute l’année les bénévoles accompagnent   vers les tribunaux ou à des consultations médicales auxquelles ils assistent si la personne le souhaite. Le docteur Fisset insiste sur le rôle des bénévoles qui ont participé à l’aménagement de cette maison où ils se sentent chez eux. « Quand les patients deviennent bénévoles, les ordonnances de médicaments diminuent ! » Le bénévolat, cela fait du bien aux autres mais aussi et surtout à soi !

Un CPTS et sa présidente

En 2021, l’Agence régionale de santé a proposé à la Maison de santé de Charleval de constituer une communauté́ professionnelle territoriale de santé (CPTS).  Créé́ en 2016 par la loi de modernisation du système de santé, ce dispositif souple a vocation à rassembler les  acteurs de santé d’un territoire afin de mieux coordonner leurs actions. La CPTS l’Armada de l’Andelle a été créée en octobre dernier, Valérie Payen a été très émue quand les professionnels de santé lui ont proposé de d’en devenir la présidente  car c’est sans doute la première fois que ce poste revient  à un professionnel du social. Tout un symbole !