Entretien réalisé le 01/07/2023 à Saint-Romain au Mont d’Or
Le pain de Caro est une boulangerie créée en 2022 dans le village de Saint-Romain au Mont-d’or. Après son CAP boulangerie obtenu en juin 2020, Caroline s’est lancée en fabriquant le pain depuis chez elle et le livrait individuellement à ses clients, jusqu’au jour où la mairie du village lui mette à disposition un local pour créer son propre fournil. Très impliquée dans la dynamique du village, elle travaille chaque jour dans les règles de l’art : tout est pétri à la main, ses pains sont aux levains naturels et travaillés avec des semences anciennes.
AUTEUR(S)
CABANIS Caroline caro.cabanis@free.fr
Fiche rédigée par Constance BOULIN
PROGRAMME
Lieu de réalisation: Les Monts d'Or
Budget: 3000
Origine et spécificités du financement : personnel
ORIGINE ET CONTEXTE
Le projet a été imaginé et créé par Caroline Cabanis, en reconversion professionnelle après de grosses prises de conscience personnelles et globales (écologie, santé). Le pain s’est présenté comme une vocation pour cette femme de 55 ans. Après l’obtention du CAP Boulangerie en 2020, Caroline s’est tout de suite mise à son compte, et réalisait des tournées de livraisons de pains aux villages avoisinants.
Ayant fait le constat qu’il n’y avait pas de boulangerie dans un des villages, cette heureuse boulangère a pu bénéficier d’un local communal (mitoyenne au fournil de Caroline) grâce à la mairie de St-Romain au Mont d’or sur une période test d’un an à compter de septembre;
OBJECTIFS
-Sensibiliser et éduquer les clients et enfants de l’école sur les provenances et qualités de ses sélections de farines biologiques.
- Favoriser et développer les semences anciennes (tests de semis sur petites surfaces).
-Assumer sa « troisième vie », par la mise en place d’une vie « alternative » : Devenir paysanne-boulangère.
-Vendre du pain de qualité (sain, nourrissant, longue conservation) à un prix accessible
-Être au contact direct des producteurs
-Faire de l’insertion, créer du lien notamment avec le projet d’accueillir au fournil des personnes en situation de handicap pour pétrir la pâte (qu’elle appelle la « pétri-thérapie »).
-Projet de fournir le pain pour la cantine de l’école
ACTIONS MISES EN OEUVRE
-Création de son fournil de A à Z en autonomie et avec un mini budget : travaux, peintures, récupération de fours et de mobilier.
-60 heures de travail par semaine, pains pétris à la main la veille pour la cuisson le lendemain (fermentation longue). Les ingrédients sont choisis méticuleusement : farines locales biologiques moulues à meule de pierre, sel de Guérande, l’eau est filtrée.
-Vente à la boulangerie de 11h30 à 19h30,
3 jours par semaine. La veille, Caroline fabrique ses pains. Elle travaille cinq jours et demi par semaine. Vente les jeudis soir sur un marché de producteur local (Vincent, maraîcher en AB), ainsi que dans une supérette Vival.
-Participe à toutes les activités culturelles du village en y proposant son pain : expos, concerts, vide-greniers, festivals…
- Animation d’ateliers boulangerie aux levains pour les enfants de l’école, et adolescents dans un lycée professionnel.
-Proximité directe avec l’école : création d’un goûter sain et gourmand pour les enfants, les « chocochous », un petit pain rond paysan au miel et pépites de chocolat.
RESSOURCES MOBILISÉES
-Prêt du local sur la place du village (loyer à partir de septembre 2023)-2 fours (850 euros chacun), 3 meubles de boulangeries et petits matériels divers.
RÉSULTATS ET IMPACTS, QUANTITATIFS ET QUALITATIFS
- Fabrication et vente de 150 à 200 kilos de pains/ semaine, demande croissante grâce aux bouche à oreille. Caroline ne fait pas de publicité, elle a pu notamment remarquer que certains clients viennent des villages voisins lui acheter son pain.
-Vente sur un marché paysan d’un producteur en AB dans la commune voisine, qui bénéficie aussi de la présence de Caroline et ses produits. Lien sociaux renforcés grâce à ce marché (évènements festifs, ambiance familiale, dégustations hebdomadaires…)
- Participe à toutes les activités culturelles (expos, concerts, vide greniers…) organisées par la mairie pour faire du pain pour les villageois.
- Don de 2 pains/ semaines pour 2 familles du village dans le besoin.
ORIGINALITÉ
-Avoir créé seule et sans investissement son fournil
-Travailler sans aucune machine (mis à part les fours).
- favoriser les solutions humaines pour se développer.
-Adhésion à DUODAY, événement vise à favoriser l'insertion des personnes en situation de handicap dans le monde du travail et à lutter contre les préjugés.
-La seule du secteur à travailler des farines anciennes (à part un autre paysan-boulanger du secteur)-Fait des tests expérimentaux de blés anciens sur des morceaux de parcelles prêtées par un ami, et sans machine agricole.
PARTENARIAT(S)
-La mairie de St-Romain au Mont d’Or (mise à disposition du local)
-Le syndicat mixte des Monts d’or (évènements en collaboration avec eux)
-Vival, supérette du coin
-Vincent, maraîcher chez qui elle tient son stand de vente tous les jeudis
RETOUR D’EXPÉRIENCE
Difficultés et/ou obstacles rencontrés pendant la mise en œuvre :
-Jalousie de certains villageois à son égard (lié au prêt du local par la mairie). On lui a envoyé la répression des fraudes après seulement 4 mois d’installation, mais fort heureusement sans amende.
-Difficultés administratives : être très rigoureux sur l’affichage des prix, des allergènes.
-Fonctionnalité du matériel : usure des fours, problèmes techniques-Continuer à vendre les pains à des prix accessibles malgré la hausse des coûts des matières premières, de l’électricité et son impossibilité d’augmenter rapidement la production du fait de sa méthode de travail lente (gage de produits de grande qualité). Elle se considère ainsi dans une « impasse » en termes de développement de son activité, qui connaît pourtant un franc succès.
-Difficulté de trouver un terrain d’entente avec l’école mitoyenne à sa boulangerie pour fournir la cantine scolaire avec son pain. L’école doit faire des économies en faisant le choix de pain standard, même si celle-ci montre fortement son intérêt pour le partenariat avec Caroline.
Solutions adoptées pour répondre aux difficultés et/ou obstacles :
- Caroline considère que ses plus grandes difficultés sont aussi ses plus grands atouts : elle a bénéficié de dons, d’entraide par ses clients et amis encourageants.
-Développer l’activité de la « pétri-thérapie » par des personnes en situation de handicap.
- Le prêt du local par la mairie : elle n’a plus à travailler au milieu de son salon ! et ne perd plus de temps et d’essence dans les longues livraisons aux particuliers.
Améliorations futures possibles :
-Réorganisation du fournil pour optimiser le travail, la production.
- Changer les horaires de ventes
- Mise en place d’une boîte à pains en accès libres avec commandes et paiements mensuels en début de mois .
- Si la production augmente, elle aimerait employer quelqu’un qui livrerait son pain à vélo. Cela éviterait au Vival du coin de manquer de ses pains à partir d’une certaine heure, Caroline ne peut plus se déplacer.
Présentation des facteurs de réussite et conseils pour une généralisation ou un essaimage :
-La qualité des farines, la qualité du procédé de fabrication, le goût de son pain.
-Sa personnalité qui plaît beaucoup : Caroline est accueillante, chaleureuse, et conciliante.
Facteurs indispensables à la réussite : la régularité, la présence, le sourire, l’accueil.
POUR EN SAVOIR PLUS
MINI-BIO DE LA PERSONNE À L'ORIGINE DE L’INITIATIVE : Après une enfance dans le Tarn puis à Lyon, Caroline travaille en tant que styliste chez Chipie puis monte son atelier de stylisme sur mesure à Madrasse dans le sud de l’Inde pendant 2 ans. Mère de famille, elle revient en France et s’installe à St Rémy-de-Provence et apprend en autodidacte le métier de décoratrice d’intérieur. A cette époque, elle rénove entièrement un hôtel particulier, puis revient à Lyon pour se spécialiser dans la fabrication de luminaires. Elle reste 12 ans dans son atelier de luminaires (fabriqués sur mesure) au bord de la Saône, qu’elle vend à des hôtels et restaurants, jusqu’au palais des festivals à Cannes. Après un burn-out, elle se reconvertit dans la fabrication du pain au levain. Elle obtient son CAP en juin 2020 après avoir travaillé plusieurs mois dans différents lieux de production, et décide de se mettre à son compte pour fabriquer du pain depuis chez elle dans les monts d’or. Après deux ans d’activité et de livraisons à domicile et sur les marchés, la mairie lui met à disposition un local sur la place du village qu’elle rénove, et c’est ainsi que voit le jour le fournil de Caroline. Avec très peu de moyens, elle réalise une charge de travail conséquente et réussit à se faire connaître dans tous les environs pour la qualité de ses pains et de son accueil.