Observatoire

Les « NEETs » de la Fontaine-au-Roi

Ni formation, ni diplôme, ni travail : voici ce qui définit les NEETs. Cette population de 14 millions de jeunes en Europe, 2 millions en France, nécessite un accompagnement personnalisé pour réintégrer le système éducatif ou la sphère de l’emploi. Les Pouvoirs Publics français utilisent plutôt le terme « les invisibles ».

Auteurs(s)

Claire
DARFEUILLE
Sylvie
FLORIO

Programme

Lieu de réalisation : Quartier de Fontaine au Roi, Paris 11e

Organisme(s)

L’Esprit du Vent

Paris 11e Arrondissement – 75011

Rue de la Fontaine au Roi

Site internet

ORIGINE ET CONTEXTE

Nous avions une expérience d’ateliers de théâtre et d’expression avec des publics au RSA dans le Val de Marne. Notre correspondante de l’Equipe de Développement Local du 11ème a souligné le manque de propositions adaptées à un public de jeunes adultes pas qualifié ou titulaire de CAP, d’un bac professionnel. Réticents au départ, les éducateurs de la fondation Jeunesse Feu Vert se sont, peu à peu, emparés de l’action initialement accueillie au sein de l’antenne jeunes du quartier. On peut dire que l’action s’est « trouvée » sur le terrain en s’adaptant aux jeunes et en réflexion partenariale.

Objectifs

Soutenir les jeunes de 18 à 30 ans, de niveau de qualification V et IV, du quartier Politique de la Ville Paris 11- Fontaine-au-Roi, dans leur accès à l’emploi ou à la formation par un accompagnement personnalisé dans leurs candidatures, une orientation vers les dispositifs de droit commun (Mission Locale, Pôle Emploi) et les propositions emploi des associations partenaires présentes dans le quartier. L’action s’adresse en priorité aux jeunes qui ne s’emparent pas seuls des dispositifs de droit commun tels que ceux proposés par la Mission Locale. Par leur mobilisation des jeunes hommes dans les rues du quartier Fontaine-au- Roi, des jeunes femmes dans leur lieu de rassemblement hors du quartier, par leur lien avec les familles, les éducateurs spécialisés de la Fondation Jeunesse Feu Vert réalisent les premières mobilisations et les « re-mobilisations » du public objet de cette demande de soutien.

ACTIONS MISES EN OEUVRE

Permanence « Emploi » ouverte chaque lundi de 14H à 16H hors vacances scolaires accueillie dans les locaux de la Fondation Jeunesse Feu Vert :
● accompagnement individuel : préparation aux candidatures : entretien, lettre de motivation, réalisation des candidatures en direct, suivi des candidatures, inscription sur le site Pôle Emploi, orientation vers la Mission Locale et les projets des autres associations – CREPI, ANI, Groupe SOS
● accompagnement collectif : droit et environnement du travail (gestion de conflits, trouver sa place dans une équipe, liens avec son supérieur hiérarchique), comprendre une fiche de paye, les documents à obtenir et conserver (contrat de travail, solde de tous comptes, bulletins de salaires), le Compte personnel de formation, préparation et accompagnement Salons de l’Emploi, Cité des Métiers, Réunion Job d’été (février), préparation à de nouveaux modes de recrutement de présentation vidéo sur application téléchargée mis en place par de grandes enseignes (H&M…)
Rendez-vous individuels en dehors des permanences – pour des jeunes qui travaillent à temps partiel soit salariés, soit sous statut d’auto-entrepreneurs et pour les jeunes qui peinent à venir à la permanence.
Réunions en dehors des temps de permanence avec les éducateurs spécialisés de la Fondation Jeunesse Feu Vert pour des bilans personnalisés des parcours des jeunes et la mise en œuvre d’une mobilisation autour d’un projet pour les jeunes qui ont cessé de venir depuis un certain temps.
Réunions organisées par l’EDL avec tous les partenaires insertion du quartier Fontaine-au-Roi.

Résultats et impacts, quantitatifs et qualitatifs

● 1 jeune, très éloigné de l’emploi, a intégré une mission de service civique avec Extra Muros (suite à un chantier jeunes qu’il y avait fait avec Feu Vert) – sortie considérée très positive pour lui (bien qu’elle n’entre pas dans les critères établis ci-dessus) avec, peut-être, une continuité vers une formation métier (à travailler avec lui en 2021.
● En attente de réponse début janvier pour une formation en alternance d’ascensoriste OTIS pour 1 jeune homme, candidature qui nous a mobilisés, à chaque étape du processus de sélection et qui illustre le réseau utile qui s’est créé autour de lui (conseillère Pole Emploi, éducateurs de Feu Vert, intervenante Esprit du Vent) avec des “rattrapages” in extremis auprès de l’organisme de formation (IRUP à Saint Etienne) – C’est presque un cas d’école pour comprendre comment un jeune, sérieux, motivé, ne parvient pas, seul à intégrer un parcours de formation avec un travail intéressant à la clef.
● 2 jeunes femmes ont intégré une formation en alternance dans l’école Pigier, école reconnue avec un processus de sélection assez exigent. Elles sont parvenues à trouver assez facilement des employeurs peut-être aussi, du fait, de la renommée de l’école.
● 1 jeune homme est parvenu à intégrer une formation de coach sportif et à trouver un employeur malgré la fermeture des salles. la préparation entretien faite avec lui a été déterminante, selon ses retours.
● 1 jeune homme a intégré la garantie jeunes. Là encore, le suivi avec les éducateurs et le lien avec la Mission Locale a été déterminant pour comprendre ce qui n’avait pas fonctionné lors de son premier rendez-vous et lui permettre de revenir vers la Mission Locale avec la bonne demande.
● Le lien orchestré par l’EDL avec les entreprises du quartier est très important. Deux entreprises se sont mobilisées in extremis pour accueillir une jeune femme en première année de BTS communication en stage au mois de février.
● L’accompagnement fait à distance pendant le premier confinement, avec 7 jeunes, a été très bien perçu. Ils étaient “reconnaissants” de cette continuité et certainement que cela a allégé une part de leurs inquiétudes face à la situation. Ce distanciel par mail, visio, sms est maintenant bien mieux intégré par les jeunes et nous a permis de travailler des préparations d’entretien en visio, pratique que les entreprises mettent de plus en plus en œuvre. Il est à souligner l’importance accrue de l’accompagnement dans un monde numérique pour ces jeunes qui ne maîtrisent pas le numérique et parfois n’ont pas d’ordinateur. S’ils sont à l’aise sur leur smartphone, beaucoup ne sont pas agiles dans leur utilisation d’un ordinateur et des logiciels de base.
● Le soutien aux candidatures Parcours Sup, organisé sur 3 ou 4 samedis, permet, outre d’aider dans l’immédiat les jeunes en terminale, de leur faire connaître le temps de permanence et qu’ils y reviennent dès septembre s’ils n’ont pas eu d’affectation. Cela permet d’éviter un temps de latence qui peut être assez long avant qu’ils ne retrouvent l’énergie de se mettre en recherche de solutions autres que la continuité scolaire initialement imaginée. Même s’ils ne font pas partie du public cible de l’action au moment où nous les rencontrons, la moitié de ceux que nous rencontrons par ce biais, le deviennent de fait à la rentrée.
Ce bilan de l’année 2021 est représentatif de la diversité des modes d’accompagnement et des typologies de jeunes bénéficiaires.

Originalité

VI ou V, ou sans qualification notamment par la diffusion d’offres, un soutien aux candidatures, la préparation aux rencontres/entretiens professionnels, une réflexion projet.

Partenariat(s)

Lien avec les partenaires institutionnels et les partenaires RSE du quartier.

Retour d’expérience

Difficultés et/ou obstacles rencontrés pendant la mise en œuvre :

Résultats
Typologie des jeunes 2020 : 27 jeunes de 18 à 24 ans (14 filles et 13 garçons habitants du quartier Politique de la Ville Fontaine au Roi) :
• 1 niveau CAP,
• 6 titulaires d’un CAP,
• 3 niveau bac Pro,
• 10 titulaires d’un bac pro,
• 1 titulaire d’un bac technique,
• 2 titulaires d’un bac général,
• 1 titulaire Titre pro 5 niveau bac+2,
• 3 déscolarisés depuis collège

Résultats 2020 : 5 jeunes ont intégré une formation qualifiante, 6 jeunes travaillent en contrat courts (CDD, contrats d’intérim).

Difficultés rencontrées
• Manque d’équipement informatique : la plupart des jeunes de ce quartier n’ont pas d’ordinateur à la maison : leur téléphone est leur seul outil de recherche d’emploi (il faut donc se résoudre à faire du travail de « secrétariat » pour eux)
• Répondre à l’immédiateté / l’urgence du jeune de façon concrète. Au moment où il vient, c’est toujours avec un besoin, une demande précise. Il faut qu’il reparte avec une réponse précise (candidature faite, rendez-vous téléphonique pour « continuer » le lendemain…). La plupart des dispositifs demandent comme préalable de s’inscrire dans le temps, de suivre un parcours. Ces jeunes ont besoin de concret, immédiat avant de s’inscrire éventuellement dans le temps.
• Manque d’ouverture à des métiers accessibles et méconnus – besoin de rencontres avec des professionnels ouvrier, techniciens qui aiment leur travail et peuvent en parler concrètement.

Solutions adoptées pour répondre aux difficultés et/ou obstacles :

• Nous avons procédé à un achat d’ordinateur portable et d’autres matériel support pour les captations vidéo (grip, pied) d’entraînement aux entretiens
• Participation au réseau d’entreprises du quartier (mais ce sont des entreprises du tertiaires, dans la com, l’architecture urbaine, qui ne peuvent aider sur des découvertes métiers directement accessibles aux profils des jeunes)
• Participation aux rencontres employeurs destinées aux prescripteurs organisées par la ville de Paris pour mieux orienter les jeunes

Présentation des facteurs de réussite et conseils pour une généralisation ou un essaimage :

• La principale clé de réussite de ce projet est le partenariat avec la prévention spécialisée (ici Fondation Jeunesse Feu Vert) :
 complémentarité des compétences mises en œuvre autour d’un jeune
 importance d’appartenir à des structures différentes (le jeune garde sait que l’intervenante insertion ne connaît pas tout de lui )
 maintien d’une position d’accueil sans aucun jugement afin d’établir une continuité, même en courant « faible », « alternatif », avec des jeunes aux parcours parfois chaotiques
• Maintien du lien en dehors des temps de rencontre physique (sms, mails avec des annonces, entretiens téléphoniques ). Même s’ils ne répondent pas, les jeunes sont sensibles au fait que l’on pense à eux. Et cela leur permet d’oser demander une modification de lettre, ou de CV à … distance.
• Face à la crise économique : accent mis sur les formations qualifiantes en alternance avec un objectif d’ouvrir les portes vers des organismes reconnus par les entreprises (école Pigier, dans notre cas)
• Accompagnement dans la connaissance du droit du travail
• Incitation systématique à s’inscrire et utiliser les services de la Mission Locale et PE.

Pour en savoir plus

Créée en 2001, la compagnie de théâtre L’Esprit du Vent s’est toujours inscrite dans les champs de la création artistique et de l’action culturelle. Au fil des ans, notre engagement sociétal s’est porté vers des actions de soutien à l’insertion sociale et professionnelle, mobilisant les savoir-faire d’artistes et de bénévoles de l’association, à destination de publics divers (personnes au RSA, jeunes adultes, immigrés).

Depuis 2018, nous recentrons nos actions d’accompagnement autour des jeunes adultes, à travers divers projets proposant autant de portes d’entrées pour tisser et maintenir un lien. Nos projets découlent de constats sur le terrain ou ont été imaginés à partir de demandes de jeunes.

L’Esprit du Vent, 20 Rue Saint Fargeau 75020 PARIS

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Comité de lecture
Date de lecture de la fiche
13/06/2021
Localisation
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Licence

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Pour citer un texte publié par RESOLIS:
Petit Monique, « Atelier 44, un atelier de menuiserie où l’esprit et le geste ne font qu’un », **Journal RESOLIS**