Observatoire

Au Maquis Terrain d’éducation populaire : le Glanage Territorial

Au Maquis est une association engagée qui développe des actions de sensibilisation à l’alimentation sur son territoire et dans les cités voisines de Lauris pour semer des graines de changement avec tous les citoyens. Elle porte un projet de glanage territorial.

Auteurs(s)

Fanny
Staub

Fiche rédigée par Clémentine Raybaud

Programme

Lieu de réalisation : Vaucluse

Origine et spécificités du financement : autofinancement et subventions et valorisation du bénévolat pour toutes les actions

Organisme(s)

Au Maquis

Lauris – 84360

Avenue de la Gare

5Salariés

100Bénévoles

Site internet

ORIGINE ET CONTEXTE

Au tout début d’Au Maquis, les membres de l’association ont commencé à cueillir des fruits non ramassés sur des vergers. Ils ont fait le constat que beaucoup de vergers étaient abandonnés avec des fruits non récoltés présents en abondance. Au Maquis au fur et à mesure de son ancrage sur son territoire a essayé de trouver des solutions pour lutter contre les surplus agricoles non consommés et non vendus que ce soit sur des parcelles abandonnées ou chez des exploitants. Son souhait était de créer une forme de solidarité entre producteurs et consommateurs/mangeurs et ainsi pouvoir soutenir l’agriculture locale paysanne.

Objectifs

– Contribuer à la baisse du gaspillage alimentaire par le glanage à la source.
– Participer à des dons sociaux à partir des produits glanés.
– Valoriser une partie des récoltes glanées dans le cadre du café associatif de l’association.
– Tisser des liens et participer à une meilleure connaissance du monde agricole pour favoriser une solidarité entre paysans et consommateurs.
– Encourager les circuits courts et la consommation de produits de saisons.
– Favoriser la transmission des savoir-faire avec l’animation d’ateliers de cuisine.
– Capitaliser cette action de glanage territoriale dans le but de l’essaimer… être à l’écoute de tout projet pouvant émerger de cette action.

ACTIONS MISES EN OEUVRE

1. Mise en place du projet glanage avec les partenaires
Temps de concertation et de construction de l’action avec les participants des années précédentes et les nouveaux selon l’Approche Orientée Changement (AOC).
2. Mobilisation des producteurs et propriétaires : Coopérations
Communication, mobilisation et mise en place de partenariats avec les producteurs et propriétaires identifiés. Une 20aine d’agriculteurs et de propriétaires ont été rencontrés pour construire une méthode d’organisation de glanage.
Les propriétaires de vergers abandonnés donnent l’accord le plus souvent à l’association pour venir cueillir et entretenir (taille) toute l’année. Au Maquis possèdent également des parcelles qui leurs sont mises à disposition en location (bail rural). La SAFER a estimé en 2016 qu’autour de Lauris, village de l’association, plus de 45% des parcelles agricoles étaient en friches.
Démarchage des agriculteurs pour projet de glanage :
L’association s’est fait connaitre grâce à son Café Villageois et la mise en place de marché associatif de paysans locaux au pied du café une fois par semaine. Les agriculteurs ont pris connaissance au fur et à mesure des actions que l’association voulait mener. La région, le Civam et l’Adear les ont aussi aidés au début pour faire connaitre leur démarche de glanage territorial. En 2017, un service civique a également contribué à la construction du réseau d’agriculteurs. Les agriculteurs chez qui Au maquis intervient pour les cueillettes sont des agriculteurs très intégrés au territoire en production biologique et très sensibles à la protection de l’environnement. Il s’agit de maraîchers qui n’ont pas réussi à vendre leurs produits ou qui ont eu un problème sur leurs itinéraires techniques ou bien de vignerons en conduite biologique avec récolte manuelle qui proposent de passer derrière eux pour récupérer les grappes moins belles pour du jus de raisins.
Les produits récoltés en particulier dans les vergers abandonnés sont souvent piqués. Au Maquis fait le choix de ne pas faire de traitement et transforme le plus possible en jus lorsque les produits sont trop abimés. Les jus transformés par Au Maquis sont vendus au verre au Café villageois et distribués lors des événements dans les quartiers prioritaires. Les jus ne sont pas certifiés biologiques.
3. Mobilisation des glaneurs-ses
L’association travaille avec plusieurs types de « glaneurs » et donc selon plusieurs approches de mobilisation avec un objectif de rassembler des publics de divers horizons et sur un territoire élargi :
Publics des villes aux alentours, notamment, via des partenariats.
Le public est très varié : familles du Sud Luberon ou des quartiers prioritaires de Cavaillon ou d’Apt, adhérents à des associations ou centres sociaux. Le nombre de « glaneurs.nes » est estimé en amont, en fonction de la quantité de travail. Il est ensuite réparti en fonction des structures partenaires et habitants pour favoriser la mixité des publics.
4. Planification des cueillettes
Planification à l’avance sur certaines cultures grâce aux partenariats mis en place en amont (cerises, olives, pommes, poires) avec les propriétaires et les agriculteurs. Au Maquis répond aussi aux appels d’urgence de producteurs ayant un surplus qu’il faut récupérer très rapidement. Nécessite une grande adaptation.
Déroulement de la journée de glanage :
Temps d’accueil et d’échange avec les participants et l’agriculteur ou le propriétaire. Explication des règles de récole et de sécurité.
La répartition des récoltes varie en fonction de l’accord passé avec le producteur/ propriétaire :
Globalement quatre destinations sont réalisées :
– une part pour chaque « glaneur » à ramener chez soi
– une part pour des associations caritatives de dons
– une part pour l’association Au Maquis qui va transformer ces produits en jus de fruits, bocaux ou en restauration pour son café associatif « le Café Villageois » de Lauris.
– une part pour le producteur et sa famille après transformation peut être prévue
6. Transformation des produits récoltés
Transformation en jus d’une partie de la récolte, grâce à deux entreprises partenaires. Les jus sont commercialisés pour le café associatif Café Villageois de Lauris ou consommées lors des ateliers ou événements Au Maquis.
Transformation également de coulis de tomates, caviar d’aubergines et séchage de fruits.
7. Temps de sensibilisation et de célébration autour du glanage
Deux fêtes du glanage ont été organisées, rassemblant les partenaires de l’action, les participants, et le grand public pour partager, célébrer et fédérer les acteurs autour de cette pratique.
Premier événement : Fête de la framboise en 2018 (glanage et transformation de framboises).
Deuxième événement : Journée à la ferme dans le cadre du Festival Vivant 2019.
Projet de La « Cité Vivante de l’alimentation »
Idée de co-construire un nouveau système alimentaire local dans une logique d’économie circulaire créatrice d’emplois durables sur le territoire en mobilisant et en fédérant les acteurs : agriculteurs, citoyens, collectivités et commerçants.
Projet « La Ferme Sociale »
Action de glanage pour le public précaire. Proposer une mise en culture participative. Location à l’année de 2000m2 de terre pour y faire du maraîchage biologique à destination du public précaire. L’idée serait de proposer à ce public de venir cultiver, ramasser et consommer des produits bons et sains, de proposer des paniers de légumes pour les ateliers cuisine avec Au Village ainsi que des paniers pour le Secours Populaire.

Autres actions menées par Au Maquis :
Naissance du Café en 2015
Création d’un café en 2015 : Le Café Villageois un café associatif par et pour les habitants. Lieu de partage. Animations, ateliers d’éducation populaire. Café ouvert à tous avec une adhésion à prix libre. Consommation de produits paysans locaux. Ouvert tous les jeudis pendant le marché paysan et les vendredis et samedis de 17h à 00h.
Actions dans les quartiers prioritaires
Tous les mercredis après-midi depuis plus de six ans l’association se déplace sur Cavaillon (quartier Dr Ayme) et Apt (quartier Saint Michel). Elle sensibilise les familles au bien manger et à la consommation de produits locaux avec des espaces de jardins cultivés (plantes aromatiques, fleurs diverses) et des espaces de convivialité. A Apt, l’action a très bien marchée, les habitants ont été très demandeurs d’un jardin partagé. Avec l’aide de la mairie, Au maquis a réussi à obtenir des terres et aujourd’hui 35 familles cultivent leurs propres jardins.
Travail avec Au Village
Depuis 2017, Au Maquis se déplace à la Maison Commune d’Au Village et propose une fois par mois des ateliers cuisines avec les résidents grâce à sa cuisine mobile. Sensibilisation au bien manger, cuisine avec des produits sains. Les deux associations ont le projet de créer une cuisine nourricière permanente.
Au Maquis travaille aussi avec le Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile en pratiquant des formations sur le jardinage et de cuisine une fois par mois.

Collecte don alimentaire auprès des paysans et des particuliers pour des réfugiés
Une fois par mois au Café Villageois, Au Maquis récupère les dons de paysans et ou de particuliers et les amènent dans les Hautes Alpes à destination de réfugiés. Elle estime à près d’une tonne par mois les dons soit 12 tonnes distribués par an. En forte période de production, les agriculteurs peuvent donner beaucoup (oignons, pommes de terre), les particuliers donnent aussi beaucoup de denrées sèches (pâtes, riz). Travail en collaboration avec « La Caillasse » sur Marseille. Sur la route du convoi, Au Maquis récupère des produits également à Gap et à Manosque.

Résultats et impacts, quantitatifs et qualitatifs

Résultats quantitatifs pour 2018/2019 :
65 journées d’action, de cueillettes de fruits et légumes délaissés dont 13 jours de transformation
6,4 tonnes de fruits et légumes récoltées
3,8 tonnes de fruits et légumes donnés à des associations et habitants
2,6 tonnes transformées en jus de fruits valorisés
16 lieux de cueillette (dont 10 paysans.nes, 5 propriétaires et des champs en friche)
451 participants, habitants du territoire Lauris et alentours Sud Luberon, des quartiers prioritaires de Cavaillon ou d’Apt, adhérents à des associations ou centres sociaux …).
2 événements « fête du glanage »
Dons aux associations caritatives locales : les cueillettes ont permis de réaliser 3,8 tonnes de dons aux habitants et associations suivantes : Resto du Coeur de Cavaillon, Secours Populaire de Lauris, association Al Manba de Marseille, CADA de Cavaillon, quartiers prioritaires de Cavaillon et Apt, associations d’accueil de réfugiés dans les Hautes-Alpes.
Les partenaires caritatifs ont exprimé une grande satisfaction à bénéficier de produits frais, aliments dont ils manquent la plupart du temps.
Résultats qualitatifs :
– des liens entre les agriculteurs partenaires et les habitants et associations pour une meilleure connaissance des enjeux
– la sensibilisation des agriculteurs et des glaneurs sur le gaspillage alimentaire, à la source et la valeur des produits paysans, le rythme des saisons, l’agriculture locale et saine.
– des liens entre les participants, habitants du territoire
– de la joie de cueillir et manger des fruits, une bouffée d’air, du partage pour les cueilleurs enchantés de ces journées au vert
– une solution territoriale réactive et adaptée aux besoins des agriculteurs et leurs envies de solidarité
– la qualité des jus de fruits réalisés avec des fruits mûrs et la distribution de ces jus lors d’ateliers et d’événements
– du plaisir pour les bénéficiaires de l’aide alimentaire d’avoir accès à des produits frais, ramassés en solidarité et anti-gaspi
Communication : Au Maquis a mobilisé les publics de son territoire en communiquant à son réseau d’adhérents du Café villageois essentiellement via sa newsletter (2000 personnes) et ses flyers. Mais aussi pour attirer de nouveaux publics, en mettant des affiches dans les villages aux alentours.

Partenariat(s)

Associations sociales partenaires mobilisées en 2018/2019 :

L’association Le village pour la mobilisation de ses publics et la co-construction d’actions de glanage communes, le Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile. le Secours Populaire de Lauris mobilisation des familles adhérentes, les familles de ses 2 quartiers prioritaires de Dr Ayme à Cavaillon et Saint Michel à Apt. Les centres sociaux partenaires ont aussi été informés des actions de glanage de l’association à Apt, Cavaillon ou Roussillon. Association Al’Manba , Lou Partage, Pause Café ont également mobilisé leurs publics.
Partenaires sociaux pour la mobilisation, l’accompagnement des équipes de cueilleurs : Le Village, Secours Populaire, CADA, Centres Sociaux (Apt et Cavaillon), familles des quartiers d’action d’Au Maquis (Dr Ayme à Cavaillon et St Michel à Apt), associations de dons (Secours populaire, Resto du Coeur, Al Manba).
Partenaires pour la mobilisation des producteurs : Association CIVAM et ADEAR, Solidarité paysannes, MSA.
Les partenaires financiers : ADEME/CR PACA la CAF, le FONJEP et l’ARS
Agriculteurs et propriétaires : 10 paysans/paysannes – 5 propriétaires de champs en friche

Retour d’expérience

Difficultés et/ou obstacles rencontrés pendant la mise en œuvre :

La difficulté de mobiliser de nouveaux agriculteurs, via les réseaux. Etant très occupés, les temps de mobilisation sont limités. Le partenariat avec les producteurs mobilisés les années précédentes a favorisé le bouche à oreille, l’exemple pour trouver de nouveaux partenaires
> La réactivité nécessaire pour répondre aux besoins, aux pics de productions… les paysans.nes ne pouvant anticiper, préviennent parfois la veille pour le lendemain.
> La difficulté de trouver les propriétaires de champs en friche depuis des dizaines d’années
> La difficulté de faire les équipes de cueilleurs en fonction des jours dispo et lorsqu’il y a peu de temps

Solutions adoptées pour répondre aux difficultés et/ou obstacles :

Un travail de capitalisation est en cours de finalisation et permettra de définir les bonnes pratiques autour de cette action, les difficultés et les réponses mises en place. Ce travail sera disponible courant 2020.
> la flexibilité est une des clés de l’action
> la coopération sur le long terme avec les producteurs et les glaneurs
> le lien de cette action avec d’autres actions menées par l’association (café associatif, marché paysan, magasin de producteurs, actions de liens dans les quartiers, à la maison commune, au cada…)
> des équipes de cueilleurs diversifiées pour permettre les liens
> un bon matériel, adapté pour tous (enfants, personnes en situations de handicap…) et/ou des missions différentes sur les journées pour permettre à tou.te.s de trouver sa place.

Améliorations futures possibles :

Volonté de territorialiser au mieux ces actions de glanage en proposant à des collectivités de porter, financer et fédérer des projets de glanages territoriaux en appuyant sur l’importance de l’intégration sociale des cueilleurs en précarité.

Présentation des facteurs de réussite et conseils pour une généralisation ou un essaimage :

La démarche de coopération avec les producteurs ou les propriétaires qui se tissent sur les années. Un travail de prise en compte de leurs enjeux, difficultés et frustrations vis à vis de ces gaspillages à la source : la construction d’une coopération qui a du sens pour eux et qui trouve un débouché pour continuer leur mission d’alimenter les habitants.
La proximité. A part quelques actions ponctuelles en dehors de notre territoire, les actions que nous avons menées se sont faites dans un périmètre réduit. Lauris et les villages alentours où il y a à la fois une belle activité agricole diversifiée et de nombreux champs en friche. Nous pensons que ce type d’actions de glanage territorial a du sens dans la proximité, mettant en lien les agriculteurs et les cueilleurs et évitant les transports non écologiques. Cela permet d’être très flexible, s’adapter à chacun, d’être réactif du jour au lendemain et de favoriser les liens.
Les liens : notre manière de lutter contre le gaspillage se tisse dans la convivialité, dans le lien entre les participants et avec les agriculteurs ou propriétaires.
L’éducation à l’alimentation locale et saine : nos récoltes sont exclusivement en bio ou « sauvage », afin d’aborder simplement la question de la santé. Les cueillettes au fil des saisons ont permis aux participants de connaître les fruits et légumes de saison, de mieux comprendre le travail des producteurs et de donner envie de les soutenir.
La transformation et le partages de savoirs : certaines cueillettes se sont suivies de séances de transformation : jus, séchage, bocaux. Ces temps collectifs sont encore l’occasion de se transmettre des savoirs, d’apprendre des techniques et de sensibiliser sur les saisons et l’importance des moyens de conservation.
Le partage entre les participants et avec les associations caritatives
Le plaisir de la formule, tout simplement ! Le plaisir pour beaucoup d’habitants de sortir de la ville ou du village et d’aller dans la nature ou dans une ferme. Le plaisir de cueillir des fruits mûrs et les manger sur l’arbre et de partager ça en famille ou avec de nouveaux voisins, au rythme des saisons !

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Comité de lecture
Date de lecture de la fiche
01/11/2020
Localisation
France
vaucluse
Domaine
AlimentationEducation et formation
Type de structure
Association, collectif, ONG
Envergure du programme
Locale
Bénéficiaires
AgriculteursPopulation urbaineUniversel
Type d’action
Lutte contre le gaspillage alimentaire
Type d’objectif
Création et renforcement du lien socialValorisation du patrimoine technique (savoir-faire)Valorisation du patrimoine alimentaireSensibilisation des consommateursSynergie entre les acteurs du territoire
Localisation
Licence

Copyright: Licence Creative Commons Attribution 3.0
Pour citer un texte publié par RESOLIS:
Petit Monique, « Atelier 44, un atelier de menuiserie où l’esprit et le geste ne font qu’un », **Journal RESOLIS**